Devenir Digital Nomad en pleine pandémie : Yéza Lucas s’engage et agit

Entrepreneure depuis trois ans, Yéza plaque son appartement parisien pour se lancer dans une nouvelle vie de digital nomade. Au début de sa récente carrière en indépendante, l’un de ses objectifs était d’augmenter son CA pour augmenter sa capacité à louer un appartement plus grand à Paris. Pourquoi un tel révirement ? Je suis allée lui demander : “Dis Yéza, toi si tenace, quelles sont les raisons qui te poussent à quitter Paris pour expérimenter une vie de Digital Nomad ?”

Christine Le Bruchec, aka Lola
8 min readNov 28, 2020
Yéza Lucas, happy à Lisbonne, une ville adaptée aux besoins des Digital Nomads.

Hello Yéza, je te connais depuis 2017, via Alexandre Dana et le réseau Livementor au tout début de son existence. A l’époque, tu quittais ton emploi salarié pour devenir Community Manager indépendante. J’avais été frappée par ta détermination : tu donnais l’image de quelqu’un de très combatif, proche de la guerrière. Tu m’avais dit : “Chez moi, c’est militaire !”.

Alors là, je me demande … Qu’est-ce qui pousse un “rouleau compresseur” de l’entrepreneuriat comme toi à quitter son confort et sa vie parisienne pour se lancer dans le nomadisme ?

Hello Lola ! Merci de me proposer cette interview :-)

Et bien j’ai décidé de m’écouter tout simplement ! Je découvre le digital nomadisme depuis peu, mais payer un double loyer, tout en sachant que je n’utilise plus mon appartement parisien me faisait mal au cœur. Après une semaine de vadrouille, j’ai donc pris la décision rapide de m’en séparer. Bien sûr, ce n’est pas sans peur : ne plus avoir de chez soi peut être flippant. Mais rationnellement, je sais que j’ai des ressources, et que je ne serai jamais à la rue. Je tente donc cette nouvelle aventure, très excitante et pleine de rencontres !

Tu m’as parlé du manque de liberté en France.

En quoi cela pèse-t-il sur ton entreprise ? C’est une question de mindset, d’état d’esprit, ou cela touche à autre chose, et si oui, à quoi ?

La situation actuelle m’a énormément touchée sur le plan psychologique : j’ai vécu le confinement seule dans 30m2 où j’ai fêté mes 30 ans. Pendant 2 mois et demi, j’ai eu l’impression d’être en prison. Ce traumatisme a des impacts sur l’énergie que je véhicule et dégage des mauvaises ondes sur le plan business. Cela n’avait pas impacté mon chiffre d’affaires mais cela aurait pu. Pour faire disparaître la colère en moi, j’ai décidé de partir de France. Ici, au Portugal, j’ai un regard plus objectif, mais néanmoins critique. Toutefois, je ne déploie plus d’énergie à me plaindre.

Être Digital Nomad, c’est pratiquer le nomadisme numérique, comme disent les français.

Qu’est-ce que la notion revêt pour toi ? Décris-nous une de tes journées de Digital Nomad. En quoi diffère-t-elle de ce que tu vivais à Paris ?

Le digital nomadisme, c’est la concrétisation de la liberté à la fois sur le plan entrepreneurial et personnel. Libre de ne pas être attaché à une terre, un lieu. Mais libre de choisir son bureau et son cadre de vie. Bien sûr, chaque liberté a son lot de responsabilité, mais ce n’est pas un problème pour moi qui suit très autodisciplinée.

Généralement, je travaille le matin depuis mon Airbnb, puis l’après midi, pour les tâches de fond, j’essaye de travailler dans des cafés digital nomad friendly — avec wifi et musique calme !

Je ne suis pas à l’aise avec l’idée de faire mes coachings dans un café de peur de déranger. Et je ne veux pas non plus payer un coworking car j’aime tester des endroits différents !

A Paris, je bossais quasiment tout le temps chez moi. Au début, ça ne me posait pas de problèmes mais aujourd’hui je sens que j’ai besoin d’un autre contexte pour travailler. Au Portugal, les cafés sont très sympas et j’aime tester ces nouvelles ambiances et comparer les chai latte (rire).

Depuis quelques années, pouvoir bouger à peu près partout tout en travaillant, était la norme des “laptop jobs” — entrepreneurs, freelance, consultants digitaux … Après quelques expériences similaires — un voyage en Europe avec Charlotte Appietto de Pose Ta Dem’ — tu sembles t’y mettre en 2020, mais de manière plus radicale.

Qu’est-ce qui t’y a poussé ? Pourquoi maintenant ? Est-ce le fait d’avoir eu 30 ans cette année ?

Début 2020, je commençais à repenser au digital nomadisme. Mais je n’osais pas franchir le pas : peur de partir seule, de ne pas savoir me débrouiller… Et puis le COVID est arrivé. Et j’ai découvert que mon pays était devenu une prison. La liberté est une valeur inscrite dans mes gênes, je n’ai donc pas supporté cette privation de liberté, et je me suis dit : “Pour sauver ta santé mentale, pars ! C’ est l’unique solution”. Par chance, je peux exercer mon activité de partout dans le monde, c’est pourquoi je suis partie !

2020 était l’année de mes 30 ans, l’année où je suis passée en société, l’année où je quitte mon appartement, l’année où je pars à la conquête du monde, bref, l’année du changement :-)

Cette transition est rude, mais m’aura fait prendre des décisions qui vont je le pense changer ma vie !

Dans une vidéo sur Instagram, on te voit arriver à Lisbonne et nous faire visiter ton appartement Airbnb.

C’est ça le nomadisme digital : visiter des appartements Airbnb ? ;)

Plus sérieusement, que recherches-tu dans cette expérience de travail et de vie ? Penses-tu qu’on soit aussi performant en tant que nomade ou penses-tu au contraire qu’il y aura un impact sur ton efficacité ?

Je cherche surtout un autre cadre qui me permette de me sentir bien. J’ai choisi le Portugal comme première étape car pas de restriction sanitaire à l’entrée (pas de test PCR ni de quarantaine) et je savais qu’une grosse communauté francophone de digital nomads y était présente.

Je m’adapte assez rapidement à un nouvel environnement donc je n’ai pas eu de problème d’adaptation particulier (le Portugal reste quand même proche de nous culturellement).

Au niveau de l’efficacité, je n’ai pas ressenti de baisse particulière. Je me connais et sais comment rester focus, en écoutant mon rythme naturel ( je ne bosse pas en fin de journée) et en ayant identifié les éléments perturbateurs (les coups de fil imprévus par exemple).

Je travaille seule chez moi ou dans des cafés et je me fixe des tâches hebdomadaires que je compartimente dans mon agenda Google : tout est cadré.

En revanche, j’essaye d’être le plus honnête possible avec moi-même : lorsque j’organise mon emploi du temps, je ne surcharge pas mes journées car je suis consciente de mes capacités de concentration !

A terme, tu envisages de quitter définitivement ton appartement parisien, de rendre les clés.

Cela ne te fait pas peur de perdre tes repères journaliers, de vivre seulement d’une connexion et de ce que tu as apporté dans ta valise ?

Si bien sûr ! Mais on ne change pas sa vie sans opérer des changements concrets au quotidien. Je suis convaincue que cette décision m’ouvrira des portes. Et au fond de moi, je sens que Paris n’est plus la ville qui me faisait tant vibrer.

J’entretiens mes relations avec mes connexions relationnelles (amis, famille) les plus profondes dans mon quotidien, et je concentrerai mes rendez-vous professionnels et personnels lors de mes prochains passages parisiens.

Paris est une grande ville, et avec le recul, on habite tous si près et on se voit si peu…

Nous vivions dans un monde hypermobile, et soudain l’échelle de nos déplacements s’est réduite.

Comment réagis-tu à cela ? Est-ce un nouveau défi et challenge, peut-on toujours bouger mais autrement et si oui, comment ?

Comme beaucoup, j’ai été choquée par ces changements brusques. Mais maintenant, je fais place au pragmatisme : où puis-je aller ? Quand vais-je partir ?

C’est presque un jeu : on se déplace pour fuir le virus. On rencontre des gens et on part ensemble, parfois on se sépare mais on se retrouve plus tard.

Pourquoi devrait-on subir cette situation après tout (quand on a le choix comme moi bien sûr) ?

On peut faire le choix de partir dans un nouvel endroit et y rester : certains choisissent la province, d’autres l’étranger.

Pour ma part, je ne sais pas encore où est-ce que je vais me sentir bien. J’ai donc décidé de prendre le temps de visiter de nouveaux pays et découvrir de nouveaux horizons :-)

Les digital nomads ont de plus en plus de restrictions mais s’adaptent et se regroupent aux endroits où leur liberté n’est pas atteinte. Cette carte du monde mise à jour quotidiennement nous est d’une grande aide. Bizarrement, cette pandémie renforce les connexions au sein de cette communauté.

Dans quels pays les Français peuvent-ils voyager sans quarantaine ? https://www.tourdumondiste.com

On a parlé du monde d’avant versus le monde d’après …

Comment vois-tu le futur du monde du travail et de l’entrepreneuriat évoluer ? Y a-t-il une vision long terme possible, ou juste du court terme, avec des réajustements permanents, selon les menaces et les opportunités ?

Je pense qu’il faut apprendre à s’adapter pour survivre à cette crise économique et sanitaire :

Adapter ses offres, adapter son business model, adapter sa communication. Certains se disent sûrement que le freelancing est risqué en période d’incertitude, mais l’avenir des entrepreneurs n’a jamais été prédictible ! La crise économique est un nouveau challenge qui n’a pas impacté tous les entrepreneurs.

Les entrepreneurs du web comme c’est mon cas ont plutôt tendance à surfer sur cette vague.

A côté, certains salariés avec qui j’ai discuté sont frileux à l’idée de se lancer dans l’entrepreneuriat, mais en ces temps incertains, alors voici mes conseils si vous hésitez à créer votre entreprise :

Sachez d’abord que la situation risque de ne pas évoluer dans les prochains mois. Et qu’il est plus difficile de retrouver un job salarié que de se lancer à son compte.

C’est pourquoi je vous conseille deux choses :

Regardez si vous avez un matelas de sécurité financière

Choisissez une activité qui vous plaît ! En ce moment, l’avenir est incertain alors autant faire ce que l’on aime :-)

On perd tous nos repères aujourd’hui et je pense que l’adaptabilité est le maître mot.

Récemment, ma vie n’avait plus de sens à Paris. C’est pourquoi j’ai pris le risque de partir. Si vous avez un peu d’argent de côté et peu de responsabilités envers d’autres, alors vous pouvez le faire !

Je veux vous encourager à faire ce que vous aimez et ce qui vous rendra heureux ! :)

Pour me contacter, voici mon site !

Merci Lola pour cette interview !

--

--

Christine Le Bruchec, aka Lola

French author with a British twist. I love nature, ginger cats and music. Birth name Christine. Social name Lola. We are both up for socializing.